samedi 23 avril 2011

On the Road... Again!

Nous étions de retour sur la route.  Après un long séjour avec David et Kaylene qui nous ont traités comme des rois. Pour l’instant de dix jours, nous étions redevenus des sédentaires paresseux bien engraissés par une abondance omniprésente. Il a donc fallu combattre la loi du moindre effort et enfourcher nos vélos de nouveau. Ce ne fût pas chose facile, mais nous savions que notre vrai domicile était sur la route.

Pour devenir de meilleures personnes, nous avons choisi de vivre comme des nomades. Nous avons préféré courir à la rencontre des gens qui ont beaucoup à partager, mais qui sont retenus par une société froide et individualiste. En parcourant des milliers de kilomètres à vélo, on se place dans une situation de faiblesse qui ouvre la porte à toutes sortent d’échanges entre les humains. L’altruisme est à son paroxysme. Il y avait donc une  bonne raison de retourner sur la route, là où ne connaissions personne. Nous avons alors réapprivoisé  nos vélos et nous sommes partie sur la côte de la péninsule Eyre, sans aucun autre but que de laisser le hasard nous surprendre. 
 
La route déserte s’étirait au bord de la mer en traversant des forêts d’arbres géants. Parfois, nous avions l’impression de voyager dans un tunnel organique. Les arbres se rejoignaient au-dessus de nos casques, cachant la vue sur le bleu qui colorait le ciel en cette journée ensoleillé. Malgré que nous avions perdu notre forme physique, le paysage nous motivait à pousser un peu plus loin. C'était une journée fraîche, parfaite pour l’exploration. Une superbe journée pour aller jouer dehors et respirer un peu d’air salin. Lorsque le soleil tourna vers le rouge, nous avons bifurqué vers une dune de sable qui allait mourir dans l’océan. Nous savions que ce n’était pas recommandé de planter sa tente sur une dune de sable, mais nous nous sommes dit qu’on s'en foutait pas mal des recommandations. Nous ne l’avons pas regretté. Jamais il n’y a eu autant d’étoiles dans le ciel.
 
Alors que nous faisions notre route vers le Nord, nous étions surpris à quel point la route était déserte. À chaque jour, nous croisions seulement quelques fermiers dans leur camion. La route était à nous. Nous étions bien heureux de pouvoir rouler côte à côte. Il est plutôt rare qu’on puisse se raconter des histoires en roulant. J’ai toujours apprécié la présence de Geneviève. Chaque jour, elle ne manque pas de me faire rire d’une manière ou d’une autre. Heureusement qu’elle était là, car la population des villages que nous croisions se comptaient en dizaines. Il y avait peu de monde à rencontrer. Il y avait peu de monde pour apprécier la beauté de l’endroit. 
 
Alors que nous pédalions au bord d’une falaise qui se jette dans la mer, nous avons fait la rencontrer de trois jeunes surfeurs en train de cirer leurs planches. Pour une session de surf de quelques minutes, ceux-ci doivent prendre de grands risques. Cela commence par la descente du mur de la falaise avec une planche en main. Le surfeur doit ensuite s’élancer dans l’eau glacée au bon moment pour ne pas se faire prendre par une vague qui vient se fracasser contre le rocher. Il suffit ensuite de surfer au-dessus d’un récif de corail ultra coupant en s’assurant de ne jamais tomber. Une chute sur un corail assurerait de vilaines blessures.  Enfin, quelques gouttes de sang suffiraient pour attirer les grands requins blancs qui sont très présents sur les côtes sud australiennes. En discutant avec les surfeurs en présence, l’un d’eux me confia le truc pour éviter la catastrophe. Il suffit de rester concentré et de garder le focus sur l’important : surfer la vague. Une logique à toute épreuve.
 
Un jour, nous sommes passés dans le petit village d’Elliston afin de faire le plein de pain et de beurre d’arachides. Nous sommes tout d’abord arrêtés au kiosque d’information touristique afin de vérifier nos directions. La bénévole en fonction nous décrivit avec passion tous les attraits de la région. Selon elle, il fallait absolument faire la boucle de 40 km  qui nous mènerait au bord de la mer et qui nous ferait voir les différentes sculptures des artistes locaux. Le seul problème c’est que nous étions en vélo et que nous avions visiblement la mine fatiguée. La journée était bien avancée et il ne restait que peu de motivation pour allonger notre route dans la mauvaise direction. Mais la dame refusa de nous voir partir sans avoir tout d’abord monté toutes les collines de la région. Elle entreprit donc de nous faire visiter son village dans sa voiture personnelle. Un geste généreux qui lui valut le méritas de bénévole touristique de l’année, discerné par  Geneviève et Pierre! En échange, elle nous fît promettre de passer le mot sur la magnifique municipalité d’Elliston. Voilà madame, c’est fait!
 
Alors que nous étions dans la voiture de cette gentille dame, nous avons aperçu deux vélos aussi chargés que les nôtres. Un couple de cyclistes roulait dans la même direction que nous.  Nous avons donc fait un arrêt pour aller à leur rencontre. Harry et Imka sont originaire d’Autriche et Allemagne. Ils étaient, eux aussi, au milieu de leur traversée du grand pays. Cette rencontre nous rappela un peu celle de Fransesco et Romina en Asie. Nous avions tant de bons souvenirs de cette rencontre que nous avons sauté sur l’occasion pour partager la route avec eux. 
 
Harry est un homme de 40 ans au cœur jeune de 20 ans. Il a déjà traversé les États-Unis, le Nord de l’Australie, la Tasmanie, le Canada et plusieurs pays d’Europe sur son vélo. Un ‘’vrai’’ comme on peut le qualifier. Imka, 36 ans qui ressemble à une fille de 25 ans, en est à son premier voyage à vélo. Elle qui a soutenu son copain pendant  10 ans alors qu’il roulait partout sur la planète. En 2011, elle a décidé de se joindre à l’expédition. 
 
Nous étions maintenant quatre à rouler, à se soutenir et à partager des repas et de nouvelles histoires. Le hasard avait bien fait son travail! Les moments partagés sur la route furent mémorable. Ensemble, nous avons fait quelques détours pour visiter une pointe ou se réfugient des loutres de mer. Nous avons aussi roulé vers cet endroit qui laisse croire que les extraterrestres sont venus sur Terre. Au milieu d’un champ se trouve cinq gros rochers façonnés par le temps à la manière d’énorme vagues. Un décor surréaliste qui suggère aux visiteurs de se laisser aller sur la prise de photos. 
 
Alors que nous avions de nouveaux compagnons de route, nous apprenions beaucoup sur leur façon de voyager. Contrairement à nous, ils se refusaient systématiquement tout camping dans les villes et villages. Ils préconisaient plutôt le camping sauvage dans la forêt et les douches froides des airs de repos. Cette façon de voyager leur permettrait de traverser le pays en dépensant seulement la modique somme de 1500$. Un exploit que nous saluons bien bas. Cette rencontre nous fît réaliser que, malgré tout, nous vivions une vie luxueuse de nomades. Il nous arrivait souvent de se payer un terrain de camping afin de prendre une douche chaude et se cuisiner un peu de kangourous sur le BBQ. Nous avions désormais le sentiment de surconsommer. Nous avons donc convenu de ralentir notre rythme de vie et de se limiter à l’essentiel, comme nos amis. Ce fût le début d’un voyage plus fort en aventure. Merci Harry et Imka!
 
Nos deux amis se dirigeaient alors à l’entrée du désert. Pour les raisons mentionnées dans le message précédant, il nous était impossible de les suivre dans cette nouvelle aventure. Nous avons donc dû rebrousser chemin. Douloureux retour en arrière. Physiquement parce que le vent se retournait contre nous et mentalement, surtout, parce que nous renoncions au défi qui se présentait devant nous. Nous avons donc fait nos adieux à nos deux amis et leur avons fait promettre de profiter du désert pour nous! Pour aider notre sort, dame nature nous servit une journée froide avec une pluie intense qui dura 10 heures. Chaque instant nous portions notre lourd fardeau de doutes sur notre choix de rebrousser chemin. Il sembla même que la nature luttait contre cette décision. Nous avons quand même fait à notre tête et avons roulé sans arrêt pendant six heures. Nous ne pouvions nous arrêté de peur de geler sous cette pluie glaciale et ce vent froid de 10 degrés. Nous avons donc dîné sur nos vélos, sans jamais arrêter.

Alors que nous étions loin de toutes grandes villes, la population aborigène d’Australie se faisait de plus en plus présente. Cette communauté présente de fortes ressemblances avec les Amérindiens du Canada.  Peuple fortement supporté par le gouvernement fédéral, on assiste aujourd’hui à la dégradation de leur traditions et coutumes au profil de la boisson, des drogues et de la violence. Le racisme chez l’Australien moyen est palpable. Ici aussi on sent la rage des contribuables qui financent la déchéance de cette population qu’on tente de redresser à coup de milliards de dollars. Il faudra peut-être un jour se rendre à l’évidence, l’argent n’est pas le remède contre tous les maux. Souvent, il est plutôt le poison qui les entretiennent. 

Erreur de planification, distraction au programme, nous avions oublié de faire le plein de nourriture avant que le weekend ne commence. Pour trois jours, tous les supermarchés des villages seraient fermés et il ne nous restait plus de carburant dans les sacs. Nous avions seulement trouvé un sac de pain sec acheté à fort prix dans un truck stop d’un trou perdu. Nous avons alors débuté une longue croisade à la recherche de nourriture. 

Cela commença par la rencontre de ce long barbu de soixante quelques années dans sa camionnette VW. Il revenait d’un voyage de pêche qui s’est étiré sur plusieurs mois dans la nature de la Tasmanie. Adepte de la solitude et de la nature, il reconnut en nous un semblant de confrérie. Il nous offrit donc des thés chauds, pain aux fruits et biscuits secs pour nous donner l’énergie de rouler encore quelques kilomètres. Avec le froid qui commençait à sévir, un peu de carburant ne ferait pas de tort!

Un peu plus loin (ou peut-être c’était un autre jour), nous avons fait une pause dans un village désert. Nous avons cherché, mais impossible de trouver la moindre âme vivante. Une ambiance lugubre, surtout lorsqu’on manque de nourriture, de sommeil et de soleil. Au tournant d’une rue poussiéreuse, nous avons alors aperçu une dame qui venait à notre rencontre. Elle reconnut que ce n’était pas des conditions pour trainer dans la nature et elle nous invita chez elle, la seule maison fleurit du village. Un peu de chaleur et de nourriture nous donna encore l’énergie de poursuivre notre route.

Un autre jour, alors que nous étions encore à cours de vivres, nous avions planté la tente au bord de la route, dans un endroit tranquille, isolé de tout. Dans un autre coup de chance, une camionnette de style hippy vient s’installer tout près de notre tente pour y passer la nuit. Les Français qui la conduisaient nous offrirent vin, chocolat et fruits! Quel régal! Encore une fois, nous avions l’énergie de poursuivre. Le lendemain, nous avons rencontré une jeune instructrice de kayak qui se dirigeait vers l’ouest avec sa voiture transformé en campeur. Elle nous a offert une dizaines de muffins que sa mère lui avait cuisiné avant son départ. Nous nous comptions très chanceux. 
 

Encore une fois, il était étonnant de réaliser à quel point les gens pouvaient être généreux. Évidemment, on ne désire jamais se retrouver dans cette situation, mais finalement, nous nous en sommes sorti plutôt bien. En quelques jours, nous avions rencontré plus de gens que jamais auparavant. Nous avons enfin rejoint un supermarché ouvert et, pour deux dollars, nous avons pris une douche chaude dans un truck stop. Nous étions comme neufs! En pleine forme et prêts pour une autre série d’aventures. 

1 commentaire:

  1. salut les nomades,à ce que je vois...la vie est généreuse avec vous,il suffit donc d'être prêt à l'accueillir généreusement.Félicitations !!!Guy

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