vendredi 11 février 2011

Le Nouveau Monde

Un trip de LSD; une expérience ultra-sensorielle; un voyage au cœur d’un monde antithétique; un monde ou le vertical l’emporte sur l’horizontale; un monde où les principes d’Archimède prévaut sur les lois de la gravité; un monde où les habitants se sont transformés en papillons et se baladent dans un univers à 360 degrés. Telle est la façon que je décrirais la plongée sous-marine.

Pour accéder à ce monde, le plongeur revêtit un équipement qui rend la vie sur la terre encore plus difficile. Une ceinture de plomb autour de la taille, un cylindre de fer dans le dos et un habit de polypropylène qui lui limite la respiration, le plongeur expérimente un pénible inconfort avant de connaître une délivrance totale; le moment où, à la renverse, il se jette dans l’océan. 


Lorsque le plongeur s’immerge sous l’eau, la pression sur ses oreilles augmente considérablement. À 20 mètres sous l’eau, la pression exercée est équivalente à 3 fois celle de la surface. Il n’est pas rare de ressentir une douleur au niveau de tympans. Il faut alors équilibrer la pression. Je dois vous avouer que tout cela nous faisait un peu peur. Et si nous ne pouvions ajuster l’équilibre? La douleur serait insoutenable! Le plus creux que nous avions déjà été était 4 mètres. Maintenant, on nous demandait d’atteindre les 30 mètres! À notre grande surprise, cela se fît sans trop d’effort et de douleur!

Nous avions désormais le permis pour accéder au monde marin qui compose 70% de la surface de notre planète. Les biologistes s’entendent sur le fait que, pour une superficie équivalente, un fond marin compte une diversité végétale et animale 10 fois plus importante que la couche terrestre. Un nouveau monde s’ouvrait à nous avec une explosion de couleurs et de vie. 

Fiji figure parmi les destinations internationales prisées par les adeptes de la plongée sous-marine. Certains sites font partis des palmarès  - top 10 - des meilleurs endroits pour plonger dans le monde. Notre présence à Fiji était un peu tirée du hasard. Nous nous comptions donc très privilégiés d’y être! 

Nos cartes de plongeurs en poche, nous sommes repartis sur nos vélos. De retour dans un monde où la gravité fait sa loi. Pour nous en faire la démonstration, la route se transforma en un chemin de terre quasi-vertical. Nous roulions alors à l’Est de l’île principale; une section très peu fréquentée par les touristes et les machines à gaz. Pour franchir un plateau accidenté d’origine volcanique, les Chinois s’affairent depuis près de 15 ans à construire une route qui complètera la boucle de Viti Levu, la grande île.

C’est en roulant dans cette section sauvage que la destine frappa à notre porte. Nous nous sommes arrêtés dans un petit village pour y prendre de l’eau et se cacher un peu du soleil qui devenait meurtrier. Notre présence causa un attroupement de petits bonhommes et de petites filles en vacance d’école. Le chef du village y était aussi, accompagné d’un jeune homme à l’apparence soigné. Les deux tentèrent alors de nous convaincre de passer quelques jours dans le village avec les gens qui ont très peu vu de blancs dans leur vie. Pour nous persuader, ils employèrent des méthodes fortes. Ils commencèrent par nous offrir des noix de coco fraîchement coupées des palmiers. Ensuite le chef nous présenta les activités des prochains jours : descente de rivière en radeau de bambou, course de chevaux dans la jungle, volleyball et rugby avec les gens du village, cérémonie du kava, pêche au harpon, etc. 

Inutile de vous expliquer pourquoi, nous avons passé deux jours avec nos nouveaux hôtes. Ce fût une expérience inoubliable. La générosité sans fin de ses gens qui n’ont même pas l’électricité! On aurait cru au premier œil qu’ils avaient peu à offrir. Erreur! Courses de natation dans la rivière, concours de flats, promenade sur chevaux sans scelle, partie de volleyball et de rugby… cela faisait partie de leur quotidien et ils nous intégraient à leur activités comme si nous étions des amis de toujours. Nous avons même participé à un gros repas commun constitué de légumes biologiques qui poussent autour de la forêt. Tout cela gratuitement, en échange de notre présence. Un aîné du village me raconta que tous ces gens seront récompensés au ciel, lors du jugement dernier. Bien reçu! Nous demeurons disponibles pour la rédaction de lettres de référence.

Alors que nous quittions cette zone sauvage de l’île, nous nous rapprochions de Suva, la capitale du pays. La densité de population s’intensifiait et l’intensité du trafic nous rendait fous. Prenant conseils de mon petit frère qui roule dans le trafic de Montréal, j’utilisai ma main pour frapper sur la carrosserie des voitures et camions qui passent à 5cm de mon guidon. Malgré le paysage magnifique de la route au bord de l’eau nous avons rejoint la capitale avec une certaine frustration. 

Notre objectif était de fuir cette ville le plus rapidement possible. S’enfuir sur une autre île connue sous le nom de Taveuni. Pour s’y rendre, il faut monter sur un bateau de fortune et partir en haute mer pour une traversée de 20 heures. Pas de soucis, nous étions motivés pour affronter l’océan. Le problème c’est qu’on était samedi. Le bateau partait seulement mardi! Nous étions donc pris dans la capitale à tuer le temps avant de partir pour Taveuni. Malheur!

Malgré l’architecture intéressante de la ville, il y avait peu pour nous satisfaire pendant 4 jours. Nous avons tout de même trouvé une super forêt pour faire une randonné. Au bout du sentier, une liane descendait d’un palmier et on a pu pratiquer nos talents de Tarzan. Nous avons aussi rencontré le président de l’association du cyclisme de Fiji. Nous avons alors eu une invitation officielle pour le tour de Fiji 2011.

Enfin, nous y étions, Taveuni! Cette petite île offre les meilleurs sites de plongée au monde. C’était la raison principale de notre présence sur cette terre perdue au milieu de l’océan. Dans un détroit marin exceptionnel, se trouve les coraux et une multitude de poissons exotiques. Il n’est pas rare d’y observer des baleines, requins, raies géantes, barracudas, etc. Pour rien au monde, nous voulions manquer cet endroit unique. Nous avons alors bordé un petit bateau 4 places et nous sommes partis au large encore une fois, équipés de notre équipement de plongé. Détail important : c’est précisément lors de cette journée qu’un cyclone de force 5 c’est développé au-dessus de Fiji pour frapper durement l’Australie. Nous étions au large, dans une chaloupe. Les vagues qui frappent. Violemment. L’estomac qui tourne. La tête qui perd le Nord, le Sud, le haut et le bas. Assez pour que je renvois mon déjeuner et mon dîner plusieurs fois par-dessus bord! Jamais je n’ai été aussi malade sur un bateau. Geneviève de son côté était un peu ébranlée, mais elle fît comme une grande! Encore une fois, tout ce calvaire s’estompe une fois sous l’eau. On y gagne un paradis calme et paisible. Un répit qui ne donne pas envie de retourner à la surface!

Entre plongées et promenades à vélo, nous avons marché au bord d’une petite rivière qui coule sur une roche usée sur une centaine de mètre. Glissades d’eau! Comme des enfants, nous avons passé l’après-midi à glisser, grimper et plongée dans l’eau froide. 

De retour à la plage où nous faisions du camping, c’était l’anniversaire d’une jeune femme qui célébrait ses 21 ans. Aux îles Fidji, cela signifie le passage vers le monde des adultes et on célèbre cela lors d’un grand regroupement et d’une fête pour tous les âges. Les petits mangent de la crème glacée et du gâteau tandis que les femmes dévorent poulet, bœuf et porc en grande quantité. Les hommes, de leur côté ingurgite une quantité impressionnante de l’éternel kava. Tout le monde y trouve son pied. La fête se termine aux petites heures du matin.

De retour sur l’île principale (après s’être tapé 40 heures de bateau en haute mer), nous nous sommes dirigés vers Pacific Harbour. Encore une fois motivés par la plongé. Cette fois, c’était pour plonger avec les requins. Je vous laisse observer par vous-même la vidéo que j’ai tournée à 30 mètres de profondeur. Les petits requins sont des reef sharks, les gros sont des bull sharks. Nous étions en liberté (sans cages) et eux aussi. Il devait y avoir une trentaine de prédateurs autour de nous, dont les plus gros mesurait plus de trois mètres! Une expérience à couper le souffle… surtout sous l’eau! 

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